Alors que l’année 2024 démarre dans un contexte macroéconomique tendu, avec des secteurs particulièrement vulnérables et des risques de crises multiples pesant sur les entreprises, EY muscle son jeu dans les domaines du restructuring et du retournement. Le cabinet aux 2 300 consultants en France continue d’affirmer ses ambitions sur le marché français des restructurations, en s’appuyant sur des expertises pluridisciplinaires qui lui permettent de répondre à l’ensemble des problématiques auxquelles font face les entreprises en difficulté, qu’il s’agisse de PME ou de grands groupes.
De la liquidité au refinancement : un changement de période en perspective
Au cours des années immédiatement post covid, qu’elles aient été cotées, sous LBO ou familiales, les entreprises ont beaucoup investi en recourant massivement à de l’endettement, ayant eu accès à un afflux de liquidités important avec un coût de la dette très faible.
Aujourd’hui, le climat a radicalement changé. Au regard de la conjoncture économique actuelle (hausse des taux d’intérêt, nombreux signaux d’alerte venant de tensions géopolitiques très fortes en Ukraine et au Moyen Orient, fermeture du marché de la dette…), les entreprises vont devoir trouver des solutions de refinancement pour faire face à leurs échéances entre 2024 et 2027. Celles-ci se cumulant souvent avec le PGE…
« Actuellement, au regard de l’inflation et de l’augmentation des coûts de l’énergie et des matières premières qui pèsent sur la profitabilité des entreprises, nous observons des business plans qui ne sont pas tous au rendez-vous et des current trading en baisse », indique Guillaume Cornu, figure historique du marché qui porte l’offre Restructuring chez EY. Avec pour conséquence probable une baisse des valorisations, et la difficulté de trouver des solutions de refinancement aux mêmes conditions qu’il y a quelques années. Dans ce contexte, le cabinet est convaincu que la frontière entre des situations de refinancement et de restructuring sera très étroite, et que certains dossiers risquent de basculer de l’un vers l’autre rapidement. 2024 devrait donc être une année soutenue en termes de missions de restructuring, dans le cadre de mandats ad hoc et conciliations.
« Ce que l’on voit, c’est une accélération des défaillances et des restructurations de PGE » poursuit Guillaume Cornu. « Bien qu’en augmentation, elles touchent encore surtout les PME. Mais au-delà des PGE, on rentre donc dans une période compliquée où les entreprises doivent trouver des solutions de refinancement. »
Un constat partagé par Sophie Barbé, associée EY responsable de l’offre Reshaping Results : « Il va y avoir un mur du refinancement, et un danger pour les entreprises lié à la hausse des taux. » De fait, l’économie traverse une période de remboursement important, avec des échéances de dettes pour les entreprises. Et l’on constate chez EY que le bas de bilan devient un sujet de préoccupation pour des entreprises qui ne sont pas particulièrement en difficulté.
C’est également le cas pour les questions de trésorerie, de stocks, et d’optimisation du BFR. Dans un environnement macroéconomique très évolutif, où les crises se succèdent à un rythme inédit, et avec une désorganisation importante des chaînes logistiques, « certaines entreprises ont de plus en plus de mal à prévoir leur activité, et ont complètement perdu la boussole de leurs besoins normatifs. » explique Sophie Barbé. Ainsi, une double tendance se dégage : d’une part les entreprises qui vivent au jour le jour, rencontrent d’importantes difficultés à gérer leur prévisionnel, et ont perdu le fil de leurs schémas budgétaires. De l’autre, des sociétés qui se projettent à long, voire très long terme, pour anticiper les difficultés à venir, notamment pour ce qui touche au refinancement.
Chez ces clients-là, les équipes d’EY commencent à observer des plans de réductions des coûts, des fermetures de sites, et des réductions d’effectifs de grande ampleur.
« Un de nos clients a lancé en fin d’année dernière un plan d’optimisation de la performance dans la perspective d’un refinancement en 2025. Si le sujet reste lointain, on comprend que pour se refinancer dans plus d’un an, on a besoin de dégager entre 3 et 5 points d’EBITDA en plus. Donc il faut s’y mettre dès maintenant » ajoute Sophie Barbé.
Des secteurs davantage exposés
Dans ce contexte global particulièrement tendu, certains secteurs sont particulièrement à surveiller. La tech par exemple, l’immobilier, la santé ou encore l’automobile dont l’industrie a été déstabilisée par la crise des chaînes d’approvisionnement et la transition vers le tout électrique d’ici 2035 en font partie.
Julien Brindeau, associé d’EY spécialisé en Restructuring, rappelle que les plus grosses start-up et scale-up sont des sociétés généralement endettées, qui vont devoir faire face à d’importants besoins de restructuration de leur dette, dans un contexte d’assèchement des financements : « les fonds sont de plus en plus sélectifs. Maintenant, les actionnaires et financiers cherchent des start-up qui brûlent moins de liquidités et qui ont démontré une capacité à être rentables. Pour résumer, ils ne cherchent plus la course à la croissance, mais accélèrent sur la rentabilité ».
Le secteur de la santé (principalement les hôpitaux et les EHPAD), fait face, quant à lui, à un problème capacitaire, explique Sophie Barbé. « Le manque de personnel soignant entraîne des difficultés majeures parce que les acteurs de ce secteur ne sont plus capables d’assurer le niveau d’activité attendu par les patients. » Un constat à mettre en rapport avec l’accroissement de la demande de soins lié au vieillissement de la population et à la multiplication des pathologies chroniques. En outre, après avoir fortement soutenu ces acteurs pendant les années covid, notamment en garantissant leurs revenus sur la base de leurs activités pré-covid, l’Etat est en train de réduire la voilure, complexifiant encore la situation pour ce secteur d’activité.
Enfin, c’est certainement vers l’immobilier que les regards les plus inquiets se tournent : « tout le monde a des craintes pour ce secteur » nous confie Guillaume Cornu. Et si les déboires du géant chinois Evergrande, qui s’est déclaré en faillite aux Etats-Unis en 2023 et avait vu sa cotation en bourse s’effondrer de 87 %, ne devraient a priori pas avoir de répercussions sur l’immobilier européen, le secteur doit néanmoins faire face à une cascade d’événements adverses. L’augmentation des taux d’intérêts n’est pas compensée par une baisse des prix, conduisant à une chute des transactions et des permis de construire. La remise en cause par le gouvernement de dispositifs fiscaux avantageux, ou encore les nouvelles exigences en matière de rénovation des bâtiments participent à fragiliser les perspectives de ce secteur en tension.
Pour ces experts du retournement et des restructurations cette accumulation d’incertitudes va conduire à une période de tensions en M&A, y compris dans le LBO, avec l’arrivée d’acteurs moins souples que les banques traditionnelles. « Le marché du financement se ferme, et de plus en plus de banques françaises se désengagent au profit de fonds de dettes internationaux, notamment anglo-saxons, qui ne se comporteront certainement pas de la même manière qu’une banque française dans la gestion de la difficulté », explique Guillaume Cornu qui prévoit que ces fonds se focaliseront essentiellement sur des indicateurs de performance financière.
Une équipe complète au service du retournement des entreprises
Une conjoncture économique qui devrait permettre à EY de faire montre de tout son savoir-faire en matière de restructuring financier, stratégique et opérationnel. Celui-ci s’appuyant sur une union de compétences et l’intégration de métiers différents et complémentaires qui dialoguent entre eux. « Il ne faut pas imaginer des hubs qui travaillent en silo et se parlent de temps en temps », explique Guillaume Cornu. « Nous sommes un ensemble ! » Ainsi, les équipes d’EY-Parthenon, l’entité de conseil en stratégie emmenées par Stéphan Bindner interviennent de plus en plus dans ce type de mission. « C’est un élément différenciant de notre offre. » ajoute Guillaume Cornu. « En outre, cette solution très intégrée (stratégie, opérations, finance) répond parfaitement aux besoins de nos clients qui travaillent au sein de fonds d’investissement, mais aussi de nos clients corporate et des créanciers – fonds de dette et banques – qui ont plus que jamais besoin de visibilité sur ces aspects. »
Ensuite, le Restructuring est abordé avec un prisme plus financier, avec des associés comme Julien Brindeau, dont le profil d’ancien CFO apporte une vision très opérationnelle des restructurations financières.
Au sein d’EY Parthenon, l’équipe de Sophie Barbé s’occupe des retournements dans leurs aspects opérationnels, sur des sujets d’optimisation du BFR, de gestion de trésorerie et de réorganisation sociale. Elle travaille conjointement avec l’équipe TSE (Transaction Stratégy Execution), portée par Aurélie Saulnier et Pierre Dresco, qui a notamment accompagné les scissions récentes de Renault Group. « Ils agissent dans des contextes qui ne sont pas distressed, mais où le carve-out devient la seule option stratégique pour retourner l’entreprise » explique Sophie Barbé.
Enfin, l’équipe de Mathieu Carlier, associé en M&A, complète cette approche très transversale. Elle intervient notamment dans des dossiers de distressed M&A et de transactions dans des contextes de sous-performances (mandat ad hoc, conciliation, redressement judiciaire, Florange…).
En bref, une équipe complémentaire qui cultive la proximité avec les entreprises qu’elle accompagne « tel un médecin de famille, avec l’expertise des grands chirurgiens ».
Par Théo Sztabholz, écrivain