Face aux enjeux de la crise sanitaire, le législateur n’a pas cessé d’adapter le droit des entreprises en difficulté. L’ordonnance n°2020-341 du 27 mars 2020 d’abord, et l’ordonnance n°2020-596 du 20 mai 2020 ensuite, ont aménagé les procédures amiables et judiciaires pour traiter les difficultés des entreprises. Ce 25 novembre, une nouvelle ordonnance a été adoptée afin de compléter partiellement l’effort d’adaptation du droit des entreprises en difficulté, en modifiant pour les adapter les dispositions des ordonnances précédentes.
Le livre VI du code de commerce, « des difficultés des entreprises », continue donc d’être adapté pour traiter les difficultés des entreprises en fonction des spécificités liées à la nature exceptionnelle de la crise sanitaire et à sa durée prévisible, par l’adoption d’une nouvelle ordonnance n° 2020-1443 en date du 25 novembre 2020, portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises aux conséquences de l’épidémie de covid-19.
Sur la prorogation de la durée de la procédure de conciliation par décision du président du tribunal (art. 1 de l’ordonnance)
L’ordonnance du 27 mars 2020 prévoyait une prolongation de plein droit de la durée d’une conciliation – qui en principe ne peut excéder cinq mois -, et ce jusqu’au 23 août 2020 inclus
L’ordonnance de novembre prévoit qu’à la demande du conciliateur, la durée de la conciliation peut être prorogée, une ou plusieurs fois, par décision du Président du tribunal, sans que cette durée puisse excéder 10 mois. Il est à souligner que ces dispositions ne s’appliquent qu’aux procédures en cours qui ont été ouvertes à compter du 24 août 2020, ainsi qu’à celles qui sont ouvertes à compter de l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 25 novembre 2020. En effet, le législateur a voulu éviter le cumul avec les prolongations résultant de l’ordonnance n° 2020-341 (qui s’appliquaient aux procédures ouvertes au plus tard le 23 août 2020).
Le rapport au Président de la République souligne que cette prorogation tend à ne pas compromettre les efforts de recherche d’une solution préventive dans un contexte de persistance de la crise sanitaire rendant difficile les prévisions. On soulignera la volonté du législateur de favoriser le recours aux procédures amiables.
Sur l’accélération de la prise en charge des créances salariales (art. 2 de l’ordonnance)
L’ordonnance n°2020-341 prévoyait la possibilité de déroger aux règles d’établissement des relevés des créances salariales, prévues aux articles L.625-1 et L.625-2 du code de commerce. De même, l’ordonnance de novembre permet une prise en charge plus rapide par l’AGS des créances des salariés.
Ainsi, les relevés des créances salariales sont transmis sans délai par le mandataire judiciaire et, sans que les modalités n’aient besoin d’être respectées. En principe les relevés des créances sont soumis au représentant des salariés, puis visés par le juge-commissaire avant d’être remis à l’AGS pour permettre le paiement avant l’expiration des délais de garantis. Or, l’article 2 de l’ordonnance prévoit que ces relevés sont transmis à l’AGS dès qu’ils sont établis, sous la seule signature du mandataire judiciaire.
Toutefois, lorsque le relevé de créances n’est pas conforme au relevé sur lequel est apposé, par la suite, le visa du juge-commissaire, le mandataire devra transmettre également sans délai ce dernier relevé à l’AGS.
Sur un assouplissement de certaines formalités (art. 3 de l’ordonnance)
L’ordonnance n°2020-341 avait pour ambition de faciliter les communications entre les différents intervenants d’une procédure amiable ou collective, en tenant compte des conditions qu’imposait le confinement. En effet, certains contentieux demeurent prioritaires, comme ceux touchant aux entreprises en difficulté, notamment quant à la prise en charge des salariés impayés et, la survie des entreprises.
Ainsi, certaines formalités avaient été assouplies en mars. L’article 3 de l’ordonnance du 25 novembre réintroduit cet assouplissement procédural, en autorisant certains acteurs des procédures amiables ou collectives à communiquer par tout moyen avec le greffe du tribunal ainsi qu’avec les organes juridictionnels de celles-ci.
Le rapport au Président de la République souligne que cet article « répond à une attente des praticiens dans un contexte d’incertitude ».
Toutefois, l’article dispose que cet assouplissement ne s’applique pas « aux documents pour lesquels le livre VI du code de commerce prévoit la faculté d’en prendre connaissance au greffe du tribunal ». Tel sera le cas pour le dépôt, par l’administrateur ou le mandataire judiciaire du compte-rendu de fin de mission dont tout intéressé peut prendre connaissance.
Sur l’application de la loi dans le temps (art. 4 de l’ordonnance)
Les dispositions des articles 1er à 3 s’appliquent jusqu’au 31 décembre 2021 inclus.
Les dispositions de l’article 2 s’appliquent aux procédures en cours et les dispositions de l’article 3 s’appliquent aux communications effectuées à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente ordonnance.
Par Agathe Caquineau