Mayday a rencontré Olivier Rémy, chef de la Mission Restructurations au sein de la Direction Générale des Entreprises. L’occasion d’un échange sur le rôle de la Mission Restructurations des Entreprises qui accompagne les entreprises de 50 à 400 salariés.
Mayday : Quel est le rôle de la mission restructuration des entreprises à la DGE ?
Olivier Rémy : Nous aidons les entreprises en difficulté. Nous nous focalisons principalement sur les entreprises industrielles, de 50 à 400 salariés. Dès lors, notre rôle est complémentaire du Comité interministériel de restructuration industrielle, sous la coordination du Délégué interministériel aux restructurations d’entreprises. Nous répondons à toutes les sollicitations que nous avons. En 2020, nous avons accompagné environ 1 700 entreprises.
À cette fin, nous nous appuyons beaucoup sur les 23 Commissaires aux restructurations et prévention des difficultés des entreprises (CRP), qui sont répartis partout en France. Ils sont nos bras armés pour accompagner les entreprises. En effet, ces derniers sont au cœur du dispositif d’anticipation et d’accompagnement des entreprises en difficulté de moins de 400 salariés.
Mayday : Quel est le périmètre de votre intervention ?
OR : Notre action est assez large, nous intervenons sur des entreprises ayant des difficultés de restructuring financier (poids de la dette trop lourd, problèmes de financement de croissance). Nous intervenons également lorsque les sujets sont industriels, pour aider une entreprise qui ne va pas très bien à mener son plan d’investissement ou son plan de développement pour rebondir. Enfin, nous sommes aux côtés des entreprises lorsqu’elles ont des problématiques sociales. Pour cela, nous travaillons en lien étroit avec le Ministère du travail et son réseau.
Aujourd’hui, nous travaillons beaucoup sur les aspects prévention. Il s’agit d’un sujet important. Plus tôt nous intervenons, plus nous avons de leviers d’action. C’est pour cela notamment que nous travaillons beaucoup avec l’outil « Signaux Faibles », outil de détection précoce des difficultés des entreprises combinant plusieurs bases de données, plusieurs indicateurs forts. Cet outil, très utilisé par les CRP, nous permet donc de faire de la prévention en plus de notre travail de traitement des dossiers de restructuration. L’idée est d’aller de manière pro active vers les entreprises pour enclencher des discussions sur une situation présentant un risque.
Mayday : Quels sont les leviers que vous avez à votre disposition pour soutenir les entreprises en difficulté ?
OR : Cette question soulève fondamentalement la question des mesures mises en place par l’État dans le cadre de la crise Covid. En mars 2020, dès le début de la crise COVID, l’État a mis en place des aides massives (PGE, report de charges sociales, activité partielle, etc.). Parmi ces aides, la Mission de restructuration des entreprises et les CRP géraient une aide en propre, le dispositif d’avances remboursables et de prêts bonifiés, qui avaient pour but de venir remplacer ou compléter les PGE pour les entreprises qui en auraient fait la demande mais qui ne les auraient pas obtenus. Nous avons mobilisé cet outil et nous le mobilisons toujours pour pouvoir venir compléter, pour les entreprises les plus en difficulté et les plus fragilisées, leurs besoins en trésorerie, notamment si cela permet de les aider dans leur rebond ou retournement. Depuis le début de la crise COVID, plus de 200 entreprises ont pu être aidée à travers cet outil, représentant près de 15 000 emplois confortés.
Au-delà des « enveloppes Covid », nous trouvons des solutions pour aider les entreprises en difficulté ou fragilisées qui n’impliquent pas forcément de mobiliser directement de l’argent public (négociations entre actionnaires, négociations avec les banques ou les créanciers publics etc). Nous pouvons donc offrir une réelle aide financière mais notre action va bien au-delà.
Mayday : Comment s’articule votre action avec celle des CRP ?
OR : En contact régulier avec la Direction générale des entreprises, les CRP traitent les dossiers sur le terrain, au quotidien, avec l’ensemble des acteurs locaux. Notre rôle est de les aider à traiter les cas les plus complexes auxquels ils peuvent être confrontés et surtout, apporter un appui à ce réseau en mettant en place les dispositifs d’aide ou des politiques globales et transverses qui ne correspondent pas à un traitement au cas par cas (comme pour l’augmentation du prix des matières premières par exemple).
Mayday : Comment percevez-vous les ouvertures de procédures collectives sur les années à venir ?
OR : En comparaison à 2019, dernière année dite « normale » pour les ouvertures de procédures collectives, l’année 2021 fait état d’une baisse de 40%. Il faut ici voir l’effet du « quoi qu’il en coûte ». C’est parce que les mesures prises par l’État ont été massives et efficaces que les entreprises françaises ont traversé cette période de crise. Toutefois, certaines entreprises (tourisme, hôtellerie, aéronautique, aérien, évènementiels) vont sortir de la crise plus endettées et impactées par la situation. Il pourrait donc y avoir un certain rattrapage du nombre d’ouvertures de procédures collectives mais il convient ici de voir la durée sur laquelle ce rattrapage aura lieu. Nous serons, de toute façon, à leurs côtés. L’État sera au rendez-vous, comme il l’a toujours été, pour soutenir les entreprises dans cette phase de sortie de crise. C’est dans cette optique qu’un conseil national à la sortie de crise a été mis en place en juin dernier ainsi que des conseillers départementaux à la sortie de crise.
Propos recueillis par Cyprien de Girval et Caroline de Bonville