Devant la gravité de la situation économique provoquée par la crise du coronavirus, le gouvernement amplifie les mesures de soutien aux entreprises. L’étude d’administrateurs judiciaires AJUP nous propose un résumé rapide des mesures connues à ce jour, qui peuvent être mises en œuvre pour vous soutenir.
1) Demande de report des dettes sociales :
1.1 – Pour les entreprises :
Les entreprises peuvent demander le report de tout ou partie du paiement des cotisations salariales et patronales dont l’échéance était au 15 mars 2020 : dans ce cas, ces cotisations pourront être reportées jusqu’à trois mois : aucune pénalité ne sera appliquée.
Vous pouvez moduler votre paiement en fonction de vos besoins (montant à 0 ou montant correspondant au paiement d’une partie de vos cotisations) :
- Si vous avez déjà déposé votre DSN de février 2020, vous pouvez modifier votre paiement jusqu’au jeudi 19 mars à 12h00, en modifiant votre paiement Urssaf (attention seulement si vous êtes à l’échéance du 15) selon ce mode opératoire.
Attention : même si la date limite de modification qui apparaît est le 16 mars à 12h00, vous avez bien jusqu’au jeudi 19 mars à 12h00 pour modifier le paiement.
- Si vous réglez vos cotisations hors DSN, vous pouvez adapter le montant de votre virement bancaire, ou bien ne pas effectuer de virement.
Si vous ne souhaitez pas opter pour un report de l’ensemble des cotisations et préférez régler les cotisations salariales, vous pouvez échelonner le règlement des cotisations patronales, comme habituellement. Pour cela, connectez-vous sur votre espace en ligne sur urssaf.fr et signalez votre situation via la messagerie : « Nouveau message » / « Une formalité déclarative » / « Déclarer une situation exceptionnelle ».
Si vous êtes employeur avec une date d’échéance au 5 du mois, des informations vous seront communiquées ultérieurement, en vue de l’échéance du 5 avril.
Le report ou l’accord de délai est également possible pour les cotisations de retraite complémentaire. Nous vous invitons à vous rapprocher de votre institution de retraite complémentaire.
1.2 – Pour les indépendants :
L’échéance mensuelle du 20 mars ne sera pas prélevée. Dans l’attente de mesures à venir, le montant de cette échéance sera lissé sur les échéances ultérieures (avril à décembre). En complément de cette mesure, les travailleurs indépendants peuvent solliciter :
- L’octroi de délais de paiement, y compris par anticipation. Il n’y aura ni majoration de retard ni pénalité,
- Un ajustement de leur échéancier de cotisations pour tenir compte d’ores et déjà d’une baisse de leur revenu, en réestimant leur revenu sans attendre la déclaration annuelle,
- L’intervention de l’action sociale pour la prise en charge partielle ou totale de leurs cotisations ou pour l’attribution d’une aide financière exceptionnelle.
Quelles démarches ?
Artisans ou commerçants :
- Par internet sur secu-independants.fr, Mon compte pour une demande de délai ou de revenu estimé, Par courriel, en choisissant l’objet « Vos cotisations », motif « Difficultés de paiement », Par téléphone au 3698 (service gratuit + prix appel).
Pour les professions libérales :
- Par internet, se connecter à l’espace en ligne sur urssaf.fr et adresser un message via la rubrique « Une formalité déclarative » > « Déclarer une situation exceptionnelle », Par téléphone, contacter l’Urssaf au 3957 (0,12€ / min + prix appel) ou au 0806 804 209 (service gratuit + prix appel) pour les praticiens et auxiliaires médicaux.
2) Demande de report des dettes fiscales :
Pour les entreprises, il est possible de demander au service des impôts des entreprises le report sans pénalité du règlement de leurs prochaines échéances d’impôts directs (acompte d’impôt sur les sociétés, taxe sur les salaires).
Si elles ont déjà réglé leurs échéances de mars, elles ont peut-être encore la possibilité de s’opposer au prélèvement SEPA auprès de leur banque en ligne. Sinon, elles ont également la possibilité d’en demander le remboursement auprès de leur service des impôts des entreprises, une fois le prélèvement effectif.
Pour les travailleurs indépendants, il est possible de moduler à tout moment le taux et les acomptes de prélèvement à la source. Il est aussi possible de reporter le paiement de leurs acomptes de prélèvement à la source sur leurs revenus professionnels d’un mois sur l’autre jusqu’à trois fois si leurs acomptes sont mensuels, ou d’un trimestre sur l’autre si leurs acomptes sont trimestriels. Toutes ces démarches sont accessibles via leur espace particulier sur impots.gouv.fr, rubrique « Gérer mon prélèvement à la source » : toute intervention avant le 22 du mois sera prise en compte pour le mois suivant.
Pour les contrats de mensualisation pour le paiement du CFE ou de la taxe foncière, il est possible de le suspendre sur impots.gouv.fr ou en contactant le Centre prélèvement service : le montant restant sera prélevé au solde, sans pénalité.
Pour faciliter l’ensemble des démarches, la DGFIP met à disposition un modèle de demande, disponible sur le site impots.gouv.fr, à adresser au service des impôts des entreprises. => https://www.impots.gouv.fr/portail/node/9751
3) Demande de chômage partiel :
Comment bénéficier du chômage partiel ?
L’entreprise doit justifier de réelles difficultés économiques, qui peuvent notamment être causées par la baisse d’activité liée à l’épidémie, l’interdiction de manifestations publiques à la suite d’une décision administrative, ou encore l’absence de salariés indispensables à l’activité de l’entreprise.
L’employeur doit formuler une demande auprès de l’administration, qui doit être motivée et justifiée auprès du site suivant :https://activitepartielle.emploi.gouv.fr/aparts/
L’employeur peut décider soit :
- de fermer l’entreprise : le contrat de travail du salarié sera donc suspendu et le salarié ne devra pas travailler pendant la période concernée
- de diminuer le nombre d’heures travaillées par les salariés
La demande peut être faite pour une durée initiale de 6 mois maximum.
L’accord des salariés est-il nécessaire ?
L’employeur n’a pas à demander l’accord des salariés concernés.
Néanmoins, dans les entreprises de plus de 50 salariés, l’employeur doit :
- consulter le CSE
- communiquer l’avis préalable du CSE lors de la demande formulée à l’administration
Aucune communication du Gouvernement n’est intervenue concernant d’éventuelles exceptions à la consultation du CSE. Par conséquent, nous recommandons d’organiser une réunion extraordinaire du CSE par visioconférence, et de recueillir son avis à distance.
Le site internet de l’Agence de service et de paiement (ASP) permettant aux employeurs de procéder à leur demande d’activité partielle très difficile d’accès en raison de l’afflux des demandes. Par conséquent, les employeurs bénéficieront d’un délai de 30 jours pour déposer leur demande, avec effet rétroactif.
L’employeur doit en tout état de cause informer par écrit les salariés concernés par la mesure de chômage partiel.
Le délai d’instruction :
Théoriquement, l’administration dispose d’un délai de 15 jours pour instruire la demande. Toutefois, le Gouvernement a demandé à l’administration de traiter de manière prioritaire les demandes liées au Coronavirus afin de réduire dans la mesure du possible ce délai d’instruction à 48 heures.
Coût pour l’employeur :
L’employeur doit verser aux salariés une indemnité compensatrice correspondant au minimum à 70 % de la rémunération brute due au titre des heures chômées (soit environ 84% du salaire net puisque l’indemnité n’est pas soumise à cotisations sociales, mais uniquement à CSG et CRDS à taux réduit). Ces versements sont exonérés de cotisations patronales.
L’employeur reçoit a posteriori une indemnisation de l’Etat au titre des heures chômées par ses salariés, dans la limite de 35 heures hebdomadaire par salarié.
Le Gouvernement a annoncé que la prise en charge des indemnités versées par l’employeur serait portée à 100%.
Toutefois, depuis le 16 mars 2020, le gouvernement ouvrira 100% des versements aux entreprises dans la limite de 4,5 Smic en vertu d’un décret qui sera pris prochainement, selon un communiqué du ministère du Travail. Les entreprises auront un délai de 30 jours pour déposer leur demande, qui sera rétroactive.
4) Aide Bpi :
ATTENTION : Ces aides sont prévues pour traiter les difficultés « conjoncturelles », liées directement aux conséquences de la crise du COVID-19. Ce qui signifie qu’elles n’ont pas de caractère automatique, en particulier pour les entreprises dont les résultats sur le ou les derniers exercices ont été déficitaires.
Il convient à titre préalable et rapidement de :
- rechercher le ou les partenaires bancaires qui accepteront de vous accompagner,
- vérifier l’éligibilité de votre dossier au regard des critères de BPI et surtout veiller à la présentation de votre dossier sur le caractère conjoncturel de vos difficultés.
4.1 – Mesures d’urgence de BPI pour soulager la trésorerie des entreprises :
De son côté, Bpifrance, la Banque publique d’investissement, a également décidé de renforcer son soutien aux entreprises. Plusieurs mesures ont ainsi été prises, notamment pour traiter leurs problèmes de trésorerie.
- Suspension, dès lundi 16 mars, du paiement des échéances de prêts accordés par Bpifrance,
- Mobilisation de l’ensemble des factures (mesure qui permet de donner aux entreprises une échéance plus longue pour le paiement de leurs factures), accompagnée d’un crédit de trésorerie représentant 30% des volumes mobilisés,
- Prêts sans garantie de 3 à 5 ans, de 10.000 euros à plusieurs dizaines de millions d’euros. Ces prêts sont assortis d’un différé de remboursement du capital.
4.2 – Une garantie à 90% pour les crédits et un numéro vert :
En parallèle, Bpifrance agit aussi sur la garantie des prêts, son principal levier d’action. Celui-ci vise à rassurer les banques pour les inciter à financer les entreprises. Le niveau de garantie des crédits a ainsi été relevé à 90% (contre 70% auparavant) de telle sorte que la banque prêteuse ne supporte plus que 10% du risque.
Cette mesure, prise en coordination avec les banques commerciales et les régions, vaut pour les prêts de 3 à 7 ans accordés par les banques privées et pour les découverts confirmés pour une période de 12 à 18 mois par la banque de l’entreprise. Par ailleurs, le mécanisme de garantie de Bpifrance est désormais également étendu aux ETI, et non plus uniquement aux TPE et PME.
Bpifrance a aussi mis en place un numéro vert (0 969 370 240) afin de faciliter aux chefs d’entreprise l’accès à ces informations.
5) Les établissements bancaires mobilisés :
Les principales mesures exceptionnelles mises en œuvre par les établissements bancaires sont les suivantes :
- Mise en place de procédures accélérées d’instruction de crédit pour les situations de trésorerie tendues, dans un délai de 5 jours et une attention particulière pour les situations d’urgence,
- Report jusqu’à six mois des remboursements de crédits pour les entreprises,
- Suppression des pénalités et des coûts additionnels de reports d’échéances et de crédits des entreprises,
- Et, enfin relais des mesures gouvernementales : dans le cadre des échanges avec les clients, communication et explication des mesures de soutien public (report d’échéances sociales ou fiscales, mécanisme de garantie publique).
6) Marchés publics :
La reconnaissance par l’État et les collectivités locales du Coronavirus comme un cas de force majeure pour leurs marchés publics. En conséquence, pour tous les marchés publics d’État et des collectivités locales, les pénalités de retards ne seront pas appliquées.
7) Gel de certaines dépenses courantes : eau, électricité, loyers pour les petites entreprises.
8) Fonds de solidarité :
En attente de précisons du gouvernement.
Par Olivier Buisine, Marc Chapon, Christophe Dolley, Eric ETIENNE-MARTIN, Cédric LAMAIRE, Vincent Rousseau, Grégory Wautot, Administrateurs Judiciaires AJUP