Mayday noue un partenariat avec le master ALED de l’Université Jean Moulin Lyon 3 qui forme, sous la direction du professeur Nicolas Borga, les futurs professionnels du retournement, afin que ses étudiants nous proposent chaque mois un éclairage sur les jurisprudences qui impactent la pratique. Plus qu’un éclairage, il s’agit d’un lien privilégié que Mayday entretient avec les étudiants du Master ALED, afin qu’ils participent à décrypter le droit des entreprises en difficulté et que cela soit pour eux l’occasion de présenter cette formation de haut niveau. Cette semaine, Clara Rouot, étudiante en deuxième année du Master ALED qu’elle réalise en alternance au sein de la structure AJUP, nous livre son éclairage sur l’arrêt de chambre commerciale de la Cour de cassation du 14 novembre 2019 n°18-20408.
La lettre de consultation – Le mandataire judiciaire doit remplir les conditions exigées par l’article R627-6 du Code de commerce lorsqu’il consulte un créancier sur une proposition de plan. Il en résulte alors que l’irrégularité ou l’incomplétude de cette lettre de consultation a pour effet de ne pas faire courir le délai de 30 jours offert au créancier pour répondre, de sorte que ce dernier est légitime à former tierce opposition au jugement de prononcer du plan.
Cour de cassation, chambre commerciale, 14 novembre 2019 (18-20408)
L’arrêt rendu le 14 novembre 2019 illustre le caractère substantiel du formalisme relatif à la consultation des créanciers. Cette sévérité n’apparait pour autant pas disproportionnée eu égard aux conséquences engendrées par L626-5 du Code de commerce mais également à la difficulté pour chaque créancier d’obtenir la reconnaissance de sa créance.
En l’espèce, une société avait présenté un plan de sauvegarde prévoyant l’apurement de son passif par un paiement de 35 % des créances en principal (option A) ou un paiement de 100 % des créances en 10 annuités (option B). Une banque, créancière de la société consultée sur ces propositions, répondit au mandataire judiciaire une fois le délai de 30 jours écoulé, en précisant opter pour l’option B. Cette réponse arrivant tardivement, ce dernier considéra qu’était acquis l’accord de la banque pour un paiement de sa créance selon l’option A et présenta le plan au Tribunal. La banque forma alors tierce opposition en invoquant l’irrégularité de la lettre de consultation, au motif qu’elle ne remplissait pas les conditions formalistes exigées par R627-6 puisqu’elle n’était pas accompagnée d’un état de la situation passive et active de la société débitrice.
Les juges du fonds ont rejetté la tierce opposition, jugeant que cette irrégularité ne portait pas sur des éléments déterminants ayant empêché le créancier de valablement opter dans le délai requis.
Néanmoins, la Cour ne l’entend pas de cette oreille et opte pour une conception objective de l’irrégularité ne faisant aucunement référence à l’irrégularité « déterminante » de la consultation, exigée par les juges du fonds. En effet, elle affirme que la moindre irrégularité rend nulle la lettre de consultation et ne fait pas courir le délai de 30 jours.
Une approche in abstracto de la situation est ainsi opérée par la Cour qui apprécie le déficit d’information né de l’irrégularité en considération d’un créancier standard et non au vu des circonstances de l’espèce. Cette interprétation stricte vient rééquilibrer la sévérité de la règle selon laquelle le silence du créancier vaut acceptation.
Par Clara Rouot
Sur l’auteur : Clara Rouot est étudiante en deuxième année du Master ALED de Lyon, qu’elle réalise en alternance au sein de la structure AJUP. Cofondatrice de l’association des étudiants du Master ALED, elle occupe aujourd’hui le poste de trésorière.