Lorsqu’une société se trouve en état de cessation des paiements, c’est-à-dire qu’elle n’est plus capable de régler ses dettes exigibles avec son actif disponible (qui correspond à ses disponibilités bancaires ainsi qu’à ses autorisations de découvert), le dirigeant a l’obligation de déclarer cet état dans les quarante-cinq jours auprès du Tribunal de commerce dont la société dépend. Cette démarche, plus connue sous le nom de « dépôt de bilan », correspond en réalité au dépôt du dossier demandant l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire.
En accomplissant cette formalité de dépôt, le dirigeant va placer sa société sous la surveillance et la protection du tribunal de commerce. Contrairement aux idées reçues, il va ainsi se donner une chance d’assurer la continuité de l’activité.
« La mise en place de règles protectrices et dérogatoires crée un cadre plus sécurisant pour les parties prenantes en vue d’assurer la pérennité de l’entreprise »
Suite à l’ouverture du redressement judiciaire, un administrateur judiciaire et un mandataire judiciaire vont être nommés. Une période dite « d’observation » va débuter, au cours de laquelle des règles dérogatoires au fonctionnement normal de la société vont entrer en application et permettre la protection du patrimoine de la société.
La plus importante de ces mesures est l’interdiction du paiement des créances antérieures. Les dettes de la société qui sont antérieures à l’ouverture de la procédure vont être gelées et ne pourront plus être payées avant l’adoption d’un plan de continuation. Cette mesure permet (i) de redonner du souffle en trésorerie à l’entreprise, (ii) de dresser un état précis de l’endettement de la société et (iii) de s’assurer de la rentabilité de l’activité. Ces éléments permettront de déterminer si un plan de redressement est envisageable, au regard notamment du montant des dettes à apurer.
Par ailleurs, les créanciers de la société ne pourront plus intenter de nouvelles actions judiciaires contre la société en vue d’obtenir une condamnation au paiement d’une somme d’argent.
La mise en place de règles protectrices et dérogatoires crée donc, à rebours des préjugés, un cadre plus sécurisant pour les parties prenantes en vue d’assurer la pérennité de l’entreprise. Elle ouvre une phase de stabilisation qui peut permettre de trouver le temps et les moyens de préparer et mettre en place un plan de relance.
« Le dépôt de bilan est donc bien différent d’une liquidation judiciaire, qui implique, à quelques exceptions près, un arrêt immédiat de l’activité de la société et une vente de ses biens »
Ces mesures, qui modifient le fonctionnement quotidien de la société, sont les moyens indispensables de son éventuel sauvetage. Il est important de souligner à ce titre que plus l’ouverture de la procédure collective aura été préparée en amont de l’acte formel de dépôt de son bilan au Tribunal, plus l’entreprise aura de chance de trouver une issue positive.
Ce mode de fonctionnement est donc bien différent d’une liquidation judiciaire, qui implique, à quelques exceptions près, un arrêt immédiat de l’activité de la société et une vente de ses biens.
La demande d’ouverture de redressement judiciaire va donc permettre à la société de profiter d’une bulle d’oxygène, qui lui permettra de préserver ses actifs et d’avoir une idée précise du montant des dettes qu’elle doit apurer. Elle pourra ainsi, au cours de la période d’observation, préparer l’élaboration d’un plan de redressement si le niveau d’activité le permet. Le dépôt de cette demande, qui relève de la responsabilité du dirigeant, est donc un acte de gestion qui marquera le début de la phase de sauvetage de l’entreprise.
Sur l’auteur : Diane Beaupuy est avocat au barreau de Paris, elle accompagne les entreprises en difficulté au cours des procédures préventives ou collectives. Elle intervient également aux côtés de repreneurs dans la présentation d’offres de reprise.
Pour aller plus loin : https://www.barbier.legal/equipe/diane-beaupuy/
Du même auteur : Le gel du passif, une bulle d’oxygène pour l’entreprise