À l’occasion du lancement de la plateforme AJAssociés Solutions Copro, Mayday a rencontré Nicolas Deshayes, administrateur judiciaire associé chez AJAssociés qui mène l’activité dédiée aux copropriétés en difficulté.
Mayday : Quelle est l’histoire d’AJAssociés Solutions Copro ?
Nicolas Deshayes : AJAssociés compte aujourd’hui 97 collaborateurs, dont plus d’une trentaine entièrement dédiée au pôle de compétence en gestion de copropriétés dégradées. Nous avons décidé de nous spécialiser sur ces missions spécifiques à partir de 2004. Composée à l’origine de 4 collaborateurs, nous n’avons, depuis 10 ans maintenant, jamais cessé de développer nos compétences et notre activité sur ce secteur dont les besoins sont en croissance permanente. L’administration provisoire de l’article 29-1 -de la Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 couvre une mission large dans la mesure où l’administrateur nommé peut se voir confié par le Président du Tribunal, outre les pouvoirs du syndic, tout ou partie de ceux de l’assemblée générale et du conseil syndical. L’objectif c’est de se retrousser les manches et de redresser la situation, tant financière, que du bâti, de la copropriété en difficulté. C’est donc une mission qui dépasse totalement celle traditionnellement dévolue dans le cadre des procédures commerciales, c’est également une source de responsabilité plus importante.
Présents historiquement à Versailles, Créteil et Bobigny (la Seine Saint Denis étant le premier département de France concerné par les copropriétés en difficulté), nous avons, au fur et à mesure des années, développé l’activité dans les autres bureaux d’AJAssociés. Nous avons récemment créé un bureau dédié à Marseille – les pouvoirs publics locaux ayant en 2017 identifié un fort besoin et lancé à appel à candidature – depuis lequel nous intervenons dans de nombreux quartiers, notamment celui où le tragique évènement de la rue d’Aubagne a mis en lumière des problématiques de bâtis en état de délabrement avancé avec des périls imminents et des évacuations d’immeuble. On gère donc en 2020 les conséquences de décisions d’urbanisation qui remontent à 60 ans en arrière.
Nous développons cette pratique depuis maintenant 15 ans. Ce pôle représente à ce jour 450 missions civiles dont 250 missions d’administration de copropriétés dégradées. Pour avoir un ordre de grandeur, cela représente un peu plus de 15 000 lots principaux de copropriétés soit 15 000 logements.
Mayday : Vous êtes administrateur judiciaire mais également syndic, pouvez-vous nous en dire plus ?
ND : Nous n’intervenons pas en qualité d’administrateur judiciaire mais comme administrateur provisoire du syndicat des copropriétaires en difficulté. Nous remplaçons le syndic qui gère au quotidien les parties communes. Dans la grande majorité des cas, nous disposons également des pouvoirs de l’assemblée générale des copropriétaires. Ainsi, nous participons à toute la chaine de décision, jusqu’à l’exécution des décisions. Cela présente l’avantage indéniable d’assurer une dynamique dans la gestion, l’inertie décisionnelle étant l’une des premières causes de difficulté d’une copropriété, même si certains y voient un facteur de démobilisation des copropriétaires. Notre objectif est pourtant bien de responsabiliser tous les copropriétaires dans cette œuvre commune qui les concerne directement.
Mayday : Après l’effondrement d’un immeuble à Marseille qui a marqué les esprits, on observe des quartiers entiers où le bâti est en mauvais état. Quels sont les enjeux et les défis du secteur ?
ND : Il y a clairement un enjeu de sécurité publique. Il faut se rappeler que les émeutes de 2005 sont nées d’un évènement malheureux survenu au sein d’une copropriété en proie à de graves difficultés à Clichy-sous-Bois. Le placement sous administration provisoire du « Chêne Pointu » a commencé en 2005 (mission qu’AJAssociés assume depuis 2013). Les pouvoirs publics sont conscients que s’ils ne s’investissent pas (en présentiel, décisions politiques et financières), ce sont des quartiers entiers qui peuvent basculer dans l’insalubrité avec toutes les conséquences que cet état provoque sur son passage : marchands de sommeils, situations de squat, délinquance etc. Il y a désormais une volonté affichée (notamment depuis le Plan Initiatives Copropriétés porté en 2018 par le gouvernement et à l’origine de très importantes opérations de requalification) de rentrer dans le domaine privé pour le préserver dans l’objectif d’assurer la sécurité des habitants, leur bien-être, pérenniser leur bâti à long terme, ou, lorsque cela est impossible traiter le recyclage d’ensembles immobiliers dont la situation est irrémédiablement compromise. C’est clairement un enjeu pour, lutter plus efficacement contre les causes de maux plus graves encore.
Mayday : Deux compétences, deux équipes, mais une seule et même structure ?
ND : Exactement. Le département AJAssociés Solutions Copro est indépendant mais fait partie intégrante d’AJAssociés. Nous développons notre propre plateforme web pour mettre en avant notre expertise et ce pôle de compétence, sans recours à une quelconque forme de délégation. Si nos missions civiles diffèrent des missions commerciales, elles ont la même essence : gérer, dans le cadre d’un mandat judiciaire, les biens d’autrui et travailler à leur préservation et leur pérennité.
Propos recueillis par Caroline de Bonville