Le 3 avril prochain aura lieu l’édition 2023 du Prix Ulysse sous le patronage de Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’Industrie. Organisé par l’ARE (Association pour le Retournement des Entreprises) ce prix récompense le meilleur retournement d’entreprise de l’année écoulée. Cette année les nominés sont la marque de produits laitiers La Fermière, Les Papeteries du Léman et les Transports Guyamier.
Comme chaque année, l’ARE organise le prix Ulysse qui récompense le meilleur retournement d’entreprise de l’année écoulée. Une dizaine d’entreprises ont été sélectionnées au troisième trimestre de l’année dernière et trois ont été nominés.
La Fermière, des produits laitiers sur le marché de l’ultra frais
Créée à Marseille en 1952, La Fermière est une marque de produits laitiers présente sur la marché de l’ultra-frais. En 2002, elle est rachetée par Jean-Jacques Tarpinian, entrepreneur marseillais tenté par une aventure industrielle, et sa sœur, associés dans une holding familiale. L’entreprise réalise à l’époque un chiffre d’affaires de 9M€. Convaincus par le potentiel des produits, les nouveaux propriétaires élaborent un plan de développement qui s’accompagne notamment du développement d’un nouvel outil industriel.
La construction de l’usine commence en 2006, mais dure deux ans au lieu d’un. Non seulement l’entreprise est retardée dans le lancement de ses nouveaux produits, mais elle voit également ses coûts fortement augmenter. La Fermière est donc confrontée à des difficultés de trésorerie, en plus d’un contentieux avec la société d’ingénierie en charge de la construction de l’usine.
Après une procédure de conciliation, elle ouvre en mai 2009 une procédure de sauvegarde pour se protéger le temps que le nouveau modèle économique porte ses fruits. Ce plan est arrêté par le tribunal de commerce de Marseille en 2010 et l’entreprise est parvenu à exécuter son plan de sauvegarde. Elle a multiplié son activité par 3,5 depuis 2010, pourtant dans un marché atone, et le CA par quatre pour atteindre 50 M€ aujourd’hui. La dette a été apurée, et l’entreprise emploie désormais 160 collaborateurs. Elle a conforté son positionnement premium, notamment en maintenant son approvisionnement laitier qualitatif avec une politique de soutien à la filière laitière de montagne, et conserve ses objectifs de croissance de 10 % par an en France et 50 % aux États-Unis pour les prochaines années.
Les Papeteries du Léman, entreprise centenaire
Entreprise centenaire, les Papeteries du Léman ont connu autant de virages stratégiques que de changements de propriétaires.
Dans les années 1980, elle se réoriente vers le papier autocollant et est rachetée en 1986 par Bolloré. En 2000, les activités de papier autocopiant sont cédées à Arjowiggins et Les Papèteries du Léman se développent avec des papiers minces de faibles grammages. La décennie qui suit est marquée par des difficultés financières importantes. En 2009, le groupe Bolloré cède PDL à un actionnaire américain.
De 2009 à 2014, les Papeteries du Léman tentent de se positionner dans le marché du papier-cigarette, avec des résultats décevants. Un plan social est donc mis en œuvre, mais ces économies ne suffisent pas. En 2014, l’actionnaire nomme un nouveau président et accepte de donner une dernière chance à l’entreprise en finançant le plan de transformation qui lui est présenté.
S’ensuit pour PDL une réorientation stratégique, des investissements et surtout un bouleversement du mode de management. Dès 2014, une nouvelle organisation vise à responsabiliser davantage les collaborateurs. La nature des relations sociales change radicalement : les salariés participent à la co-construction de la stratégie et des objectifs de l’entreprise, les grèves auparavant fréquentes disparaissent, et on enregistre une diminution de l’absentéisme et du turn-over.
PDL disposant de trois machines de production de papier, trois unités autonomes sont créées sur le concept de « mini-usines », chacune affectée à un segment de marché particulier pour optimiser son outil de production : le papier pour l’industrie du tabac, l’impression mince et le papier alimentaire qui représente aujourd’hui plus de la moitié du CA.
Les performances de l’entreprise s’améliorent spectaculairement. Sans avoir recours à du financement extérieur, l’entreprise redevient bénéficiaire à partir de 2020 et voit son chiffre d’affaires progresser de 70 M€ en 2018 à 103 M€ en 2022, avec une croissance de 20 % par an au cours des deux derniers exercices. Treize emplois ont également été recréés. Un redressement réussi qui a permis aux Papeteries du Léman de célébrer leur centenaire en 2022 avec confiance dans l’avenir.
Transports Guyamier, une entreprise familiale
Créés en 1948, par Monique Guyamier, trois générations se succèdent à la tête de l’entreprise, Nicolas Guyamier, son petit-fils, en prenant les rênes en 2012.
L’entreprise est alors en situation difficile. L’activité est en effet structurellement déficitaire, les charges augmentant plus vite que les recettes. Les avances de trésorerie consenties aux autres sociétés du groupe ainsi que la faiblesse du capital social la mettent en grande difficulté financière avec un passif de 9 M€ en 2014.
Dans le but d’obtenir plutôt un plan de continuation, Nicolas Guyamier procède en 2014 à la vente de biens immobiliers pour payer la dette, et en prend une partie en charge à titre personnel en apportant 1,2 M€. Ce plan de continuation est décalé de 24 mois suite au décès de Monique Guyamier en 2013, mais se met en place à partir de 2016.
L’apport de fonds personnels permet d’accélérer la résolution des problèmes financiers, mais le retournement va réellement s’appuyer sur une restructuration et une optimisation du modèle économique. Ses recettes progressent et ses charges diminuent.
L’entreprise a alors les moyens de se développer et met en œuvre sa stratégie de croissance externe à partir de 2018. En utilisant des LBOs avec la confiance des banques, elle construit ainsi un quasi-monopole sur l’agglomération bordelaise. Le rachat des Transports Lacassagne en 2019 lui permet en outre de mutualiser des charges de structure, ce qui contribue grandement au retournement du Groupe Guyamier. Ces différentes actions permettent de rembourser le plan par anticipation avec quatre ans d’avance sur le terme.
Consécration, il a été élu « Transporteur de l’année 2022 » par l’Officiel des Transporteurs.
Vous avez encore quelques jours pour voter via le lien suivant : Prix Ulysse 2023 (vote-prix-ulysse.fr)
Rendez vous ensuite le 3 avril prochain à 19h à l’Automobile Club de France, place de la Concorde à Paris, pour l’annonce du retournement de l’année.
Par Gwenaëlle de Girval