Inquiétude dans le monde agricole après la décision rendue le 29 novembre 2017 par la Cour de cassation qui décide d’exclure les sociétés agricoles du bénéfice d’un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire supérieur à 10 ans, alors même qu’elles représentent quasiment la moitié des structures exploitantes et qu’elles exploitent 65% de la surface agricole utile sur le territoire. Par cette décision, le secteur agricole craint qu’un grand nombre d’entreprises agricoles se dirigent tout droit vers la liquidation, le temps étant souvent un allié pour sortir des difficultés dans ce secteur.
Le 13 mars 2018, dans une réponse écrite au député André Chassaigne qui soulevait son inquiétude sur le traitement des entreprises agricoles en difficulté, le Ministre de l’agriculture et de l’alimentation Stéphane Travert apporte une réponse qui se veut rassurante pour le secteur agricole.
Si depuis 2015, les tribunaux dérogeaient effectivement au droit commun et accordaient en général des durées supérieures en raison notamment de la dégradation de la conjoncture dans le secteur agricole. Cet arrêt vient stopper cette pratique en limitant ces procédures à 10 ans maximum. Stéphane Tavert rappelle que les règles relatives aux exploitations agricoles en difficulté s’appliquent précisément aux « personnes physiques exerçant des activités agricoles », comme le prévoit l’article L.351-8 du code rural et de la pêche maritime que le Conseil constitutionnel a d’ailleurs déclaré conforme à la Constitution. A partir de là, seules les personnes physiques peuvent bénéficier d’une procédure supérieure à 10 ans, ce qui justifie la décision de la Cour de cassation du 29 novembre 2017.
Néanmoins, dans le cadre de la loi plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises, actuellement en cours d’élaboration, le ministère de la justice, soutenu par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation propose d’introduire une précision dans le code de commerce de commerce afin d’harmoniser la situation des agriculteurs en leur permettant de bénéficier d’un plan de redressement supérieur à dix ans, qu’ils exercent sous forme individuelle ou en société. Il rappelle également que les tribunaux de commerce, auront des compétences étendues à l’ensemble des entreprises, y compris les exploitants agricoles.
Le ministère de la justice est sensible aux inquiétudes du monde agricole et prévoit un dialogue avec les différentes parties prenantes sur ce sujet. De son côté, le ministère de l’agriculture et de l’alimentation restera attentif à la prise en compte des spécificités agricoles dans le cadre des procédures collectives.
Par Bastien de Breuvand