Par jugements du 19 octobre 2022, le tribunal de commerce de Paris a arrêté les plans de cession des actifs et activités des sociétés du groupe de restauration multi-marques Smart K qui exerçaient sous la marque « OFC – The Original Food Court » au profit de Bertrand Corp, holding du groupe Bertrand qui exploite plus de 1.000 restaurants sous 45 enseignes dont Burger King.
Composé d’une société holding (Smart K Group) et de 9 filiales, dont 4 ayant réellement commencé leur exploitation, le groupe Smart K, créé en 2019, propose en vente à emporter, click&collect et livraison, à travers les plateformes Uber et Deliveroo, des plats préparés sur place (burgers, pizzeria, sushi, tex-mex, oriental pâtes…) sous la marque « OFC – The Original Food Court ».
Dès le printemps 2022, elle rencontre des difficultés en raison, de frais de siège également importants car dimensionnés pour l’exploitation de 12 à 15 sites, d’un sujet d’atteinte de taille critique, d’une difficulté à lever des fonds depuis la crise ukrainienne, de la concurrence sur le marché de la « food delivery » nécessitant d’importantes dépenses de communication et de l’absence d’atteinte d’un chiffre d’affaire lui permettant de disposer d’un rapport de négociation favorable avec les plateformes de commande et livraison Deliveroo et Ubereats.
C’est dans ce contexte que par jugement du 30 août 2022, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de chacune des sociétés du groupe et que l’administrateur judiciaire a initié dès l’ouverture de la procédure un appel d’offre avec de courts délais en raison du peu de trésorerie du groupe.
Aucune offre n’a été déposée concernant les actifs et activités des filiales situées à Bordeaux, Nancy et Nice dont l’activité n’avait pas démarré, de sorte que leur liquidation judiciaire a été prononcée.
Pour les autres sociétés, deux offres de reprises ont été présentées par Quick Gestion et Bertrand Corp. Aux termes de son offre, Quick Gestion proposait la reprise de la plupart des éléments corporels et incorporels des sociétés, 94 postes sur 100, pour un prix de cession de 460.000 euros (hors charges augmentatives du prix). Bertrand Corp. proposait également la reprise de la plupart des éléments corporels et incorporels des sociétés, 76 postes sur 100 pour un prix de cession de 471.500 euros (hors charges augmentatives du prix).
Au-delà de ces prix et coûts, la reprise incluait également le paiement à l’un des créanciers bancaires du groupe d’un montant estimé à 969K€ au titre des dispositions de l’article L.642-12 alinéa 4 du code de commerce (transfert de la charge des sûretés), l’engagement d’investissements supplémentaires estimés à un total d’environ 2 millions d’euros pour rénover les locaux ainsi que le coût du personnel pendant la durée de fermeture des locaux d’exploitation pour la réalisation des travaux.
Les offres étaient très proches financièrement mais l’offre de Quick Gestion un peu mieux disante quant au nombre de postes repris. Malgré cela, les salariés ont donné un avis favorable à l’offre de Bertrand Corp. dont l’activité repose déjà sur un portefeuille diversifié d’enseignes détenues en propre contrairement à Quick Gestion, ce qui leur permet d’éviter une phase d’incertitude qui serait liée au développement par Quick de nouvelles enseignes non connues à ce jour. Les salariés ont également été sensibles à la volonté de Bertrand Group de créer une synergie entre plusieurs marques leader que le groupe détient ce qui « permettrait le développement d’une offre pertinente par rapport au concept OFC et exploiterait l’étendue des compétences des collaborateurs ».
Ainsi après avoir rappelé que les deux offres était de « grande qualité en ce qui concerne le sérieux et la capacité des candidats à relancer l’activité d’OFC » le tribunal a jugé que « l’offre Bertrand Corp. est préférable à l’offre Quick Gestion en ce qui concerne le critère du maintien d’activité». Sur le critère du maintien de l’emploi le tribunal a jugé « que l’analyse du maintien de tout ou partie des emplois nécessite de ne pas se limiter au simple nombre d’emplois repris (…) mais de s’interroger sur la pérennité des dits emplois », que « les représentants des salariés (…) ont indiqué que le choix de l’offre de Quick Gestion risque d’aboutir à des démissions massives ou à des abandons de postes de la part de salariés qui n’adhèrent pas au projet de reprise » de sorte que « ce risque amoindrit l’intérêt de l’offre de Quick Gestion en terme de pérennité des emplois repris ». Le tribunal a ainsi retenu que « le critère du maintien de tout ou partie des emplois ne permet pas de distinguer une offre au détriment de l’autre » et qu’il en était de même pour le critère d’apurement du passif compte tenu des prix proposés « équivalents » mais également des coûts réels de chaque offre pour les organismes sociaux.
C’est dans ce contexte que, par jugements du 19 octobre 2022, le tribunal a arrêté les plan de cession des actifs et activités des sociétés Smart K Paris, Smart K group, Smart K Levallois, Smart K Lille et Smart K Paris au profit de Bertrand Corp.
2M&Associés (Marine Pace) est intervenue en qualité d’administrateur judiciaire.
Axyme (Jean-Charles Demortier) est intervenue en qualité de mandataire judiciaire.
Tellechea Avocats (Marie Tellechea, associée et Sarah Baudart, collaboratrice) est intervenu en qualité d’avocat du groupe Smart K.
Arkara (Stéphane Dayan et Pauline Ernoux, associés) est intervenu en qualité d’avocat de Bertrand Corp.
Depoix -Robain & associés (Nicolas Depoix-Robain, associé et Louise Chamblas, collaboratrice) est intervenu en qualité d’avocat de Quick Gestion.
Par Gwenaëlle de Girval