« Si vous voulez faire une vacherie à quelqu’un, rendez le célèbre » Henri Grouès dit Abbé Pierre.
C’est au début du siècle dernier que Jules Bel, alors accompagné de ses deux fils, Henri et Léon, allait faire trembler les murs de Lons-Le-Saunier qui se trouva être le théâtre d’un affrontement sans merci où les vaches nous firent tout un fromage !
Le site de Lons-Le-Saunier n’était pas anodin, puisqu’il se situait à proximité des chemins de fer, utiles à la vente, et des salines de Montmorot, dont l’importante production de sel allait favoriser les techniques d’affinage.
Un site stratégique donc, qui avait également attiré les frères Grosjean qui s’étaient unis pour donner naissance en 1901 aux Fromageries Grosjean Frères. Cette maison, l’une des plus anciennes de son époque, était connue pour disposer d’usines ultra-modernes.
« Il faut flatter la vache avant de la traire » …
Chemin faisant, c’est dans l’ambiance festive de l’entre deux guerres, en 1921, que la maison Bel décida de donner naissance à la très célèbre … Vache qui Rit, fromage fondu dont le procédé de fabrication fut inventé en 1911 par Fritz Stettler.
Ne pouvant rester les bras croisés, les frères Grosjean répliquèrent en 1926 et lancèrent La Vache du Jura qui deviendra rapidement « La vache sérieuse », « un des rares produits alimentaires modernes que l’on peut manger sans dégoût après l’avoir vu fabriquer » !
Cette seconde Vache, représentée par une vache à l’expression sérieuse, était de qualité car c’est la caractéristique du « fromage qu’on trouve dans les maisons sérieuses ». Cette expression annonçait déjà aux consommateurs la guerre qui allait naître entre la « Vache qui rit » et la « Vache Sérieuse ».
A l’annonce de cette nouvelle marque, les Fromageries Bel répliquèrent avec une publicité qui annoncèrent que « le rire est le propre de l’homme… et de La vache qui rit ». Ce à quoi les fromageries Grosjean répondirent que : si « le rire est le propre de l’homme, le sérieux celui de la vache ».
Après plusieurs années d’un long combat publicitaire et judiciaire, la justice mit finalement un terme à cette concurrence. Ainsi, en 1959, les Fromageries Grosjean furent contraintes d’abandonner « La vache sérieuse » qui deviendra, quelques mois plus tard, « La vache Grosjean » puis « Le Grosjean » et même « La bonne vache ».
En 1969, les Fromageries Grosjean furent intégrées au groupe Nestlé puis, en 1985, au groupe Lactalis, actuellement actionnaire à 25% du groupe Bel … le monde est petit !
Par Cyprien de Girval